Les ménages et collectivités connaissent une période de crise économique et de mutation sociétale (chômage, famille monoparentale) impactant directement le secteur de la rénovation énergétique qui rencontre donc de nombreux blocages économiques et financiers. Cela s’explique par la difficulté des ménages à se projeter vers l’avenir (surtout les personnes âgées) couplée au contexte économique peu favorable et au retour sur investissement long et difficile à mesurer.
Les études économiques tendent à démontrer que les prix de l’énergie, « trop bas », en France ne permettent pas d’enclencher la transition. Il faut un juste prix de l’énergie qui reflète son coût pour inciter à faire des économies. Une fiscalité écologique, en donnant un coût à la tonne de CO2 émise en fonction des énergies utilisées, permettrait de rendre plus perceptible l’intérêt économique d’enclencher une démarche de réhabilitation[7].
Le rapport de la mission Canfin-Grandjean-Mestrallet remis en juillet 2016 effectue une revue de la littérature économique récente, avec des prix variant entre 10 et 79 €/tonne de CO2 et préconise un prix du carbone dans un « corridor » prévisible pour les marchés (prix plancher et prix plafond fixés), de 25 à 50 €/tonne de CO2 en 2020, à 40 à 100 €/tonne en 2030[8].
Il en est de même pour les incitations financières : à quelles conditions peuvent-elles déclencher un acte de rénovation ? En effet, il existe de nombreux outils de financement de la rénovation énergétique dont le problème de complexité est régulièrement soulevé par les acteurs de l’efficacité énergétique, qu’ils soient particuliers, artisans ou industriels.
La Cour des comptes a critiqué, dans le rapport[9] mis en ligne en novembre 2016, les incohérences et l’efficacité « incertaine » des dépenses fiscales en faveur du développement durable qui se sont multipliées ces dernières années.
Concernant le CITE, l’Eco-PTZ et la TVA à 5,5%, elle déplore « une mauvaise évaluation de l’impact environnemental » ainsi que « des résultats obtenus [qui] restent décevants »[10]. Le rapport conclut en expliquant qu’il « conviendrait de rendre plus ciblée l’aide globale à la rénovation thermique qui remplacera les actuelles aides fiscales et de moduler son taux en fonction de la performance énergétique des travaux ».
A cela s’ajoute une autre problématique : dans l’enquête de terrain de l’UFC-Que Choisir menée en 2014, l’on apprend que la barrière du financement est un élément déterminant dans le passage à l’acte : « un sondage de 2013 avançait que le fait d’avoir des ressources financières personnelles a convaincu 72% des sondés de lancer des travaux de performance énergétique ». Et toujours selon le même sondage, « 19% des ménages ayant entrepris des travaux de performance énergétique n’ont pas effectué l’intégralité des travaux nécessaires par manque de ressources et d’aides financières » [6].
UFC-Que Choisir explique l’impact de ce problème de financement pour les ménages ainsi : « En raisonnant à partir des coûts bruts des travaux, sans prise en compte des aides et subventions, le consommateur aura tendance à s‘orienter vers le devis le moins onéreux quelle que soit l’ampleur des travaux contenus …. Alors que la prise en compte des aides et subventions aurait pu lui permettre de faire des travaux certes plus coûteux mais au final bien plus rentables »[6].
Le travail de conseil des professionnels est donc capital pour la bonne tenue du marché de la rénovation énergétique.
Enfin, le retour sur investissement des travaux de rénovation énergétique reste un frein majeur car difficile à mesurer. Le particulier n’ayant pas vraiment de vision à long terme préférera plutôt un investissement « plaisir et embellissement » qu’un investissement « travaux de rénovation énergétique » peu visible et peu attractif.